mercredi 29 janvier 2014

J-63 : Quatre-vingt-dix minutes avec un cœur de chimpanzé

La transplantation cardiaque est très souvent associée aux chirurgiens Christiaan Barnard qui réussit une première mondiale en Afrique du Sud en 1967, ou à Christian Cabrol - parrain de la Course du Cœur - pour la première européenne quatre mois plus tard. Dans le cheminement qui a conduit vers l'exploit de redonner vie avec le cœur d'un autre, il y a d'autres pionniers comme James D. Hardy.

 University of Mississippi)

En 1963, l'Américain fut le premier au monde à réussir la transplantation d'un poumon. Mais la performance fut éclipsée par l'assassinat le même jour du défenseur des droits de l'Homme Medgar Evers. Un an plus tard, alors que l'équipe de James Hardy a déjà réalisé de nombreuses transplantations sur des animaux, l'hôpital de l'Université du Mississippi reçoit Boyd Rush, un patient en très grande insuffisance cardiaque. Un donneur à l’encéphalogramme plat est disponible, mais à l'époque, seul l'arrêt cardiaque signe la mort d'un individu. Terrible paradoxe, il est impossible de prélever le cœur vaillant ! Boyd Rush va s'éteindre et James Hardy décide alors de tenter l'ultime recours : prélever le cœur de Bino, le plus gros chimpanzé de l'animalerie du laboratoire. L'opération se solde par un miracle : le cœur du singe se remet à palpiter dans la poitrine de Boyd. Celui-ci ne survivra hélas que 90 minutes, victime de perturbations du métabolisme et du cœur sous-dimensionné de l'infortuné donneur.  

James Hardy publiera 23 livres et près de 500 articles scientifiques. Il confiera qu'il était conscient "du risque de consternation et des critiques majeures de l'opinion publique". Mais sa tentative fut saluée par le corps médical. Elle ouvrait la voie vers de vrais succès. C'était le 23 janvier 1964, il y a cinquante ans.

Frédéric Lesur

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